« Universalisme » – Mame-Fatou Niang et Julien Suaudeau
Définition : Doctrine qui considère la réalité comme un tout unique, dont dépendent les individus (opposé à individualisme, atomisme), Le Robert.
Julien Suaudeau et Mame-Fatou Niang nous invitent, au travers d’un traité d’une centaine de pages, à décrypter le concept d’universalisme et à « le rendre à ce qu’il veut dire » en déconstruisant les discours universalistes de la sphère politico-médiatique et en offrant de nouvelles voies de réconciliation entre république, universalisme et anti-racisme.
- Renoncer aux certitudes
Réconcilier universalisme et anti-racisme c’est se placer sous le signe « du devenir et non de l’être, de l’autre et non de soi, du doute et non de la certitude ». C’est penser le racisme, raconter son histoire, analyser ses concepts, décrypter son héritage dans notre quotidien.
- Relativiser les points de vue
L’universalisme ne doit pas donner lieu à un système, ni être une valeur qu’on s’accapare, engendrant des mécanismes d’exclusion. Il doit reposer sur notre capacité à « regarder le monde au travers d’autres yeux que les nôtres », à sortir du prisme de nos propres récits personnels et historiques.
Il convient également de faire un distinguo entre
un universel décrété, traduction de l’impératif catégorique de la pensée Kantienne, selon lequel l’universel est le réel lui-même l’universel réalisé, un universel ancré dans la réalité, post colonial qui écoute et considère les dissonances de la société.
- Éveiller la conscience historique
Embrasser la réalité, regarder le passé en face et admettre que nous sommes une société post-coloniale qui continue à en porter les stigmates, apparaît comme une première étape nécessaire à la déconstruction d’un système de domination. Questionner nos biais, mettre en lumière les angles morts des récits historiques, faire face au racisme en tant qu’objet organique c’est lutter contre l’indifférence et embrasser l’universel en laissant s’exprimer la pluralité des voix qui le composent.
Aussi, repenser l’universalisme c’est remonter aux origines de sa « falsification ». A sa source, le colonialisme : le pseudo-universalisme n’est pas l’universalisme « comme projet pour l’humanité mais une idéologie de l’universel au service de la supériorité européenne ». Ce pseudo-universalisme repose sur une méprise : la décolonisation n’a pas supprimé toutes les formes de colonialisme. Si elle a pris fin au niveau étatique, elle perdure néanmoins dans les sociétés, les mentalités et les rapports économiques. L’occulter, au motif qu’elle nous diviserait et serait donc de fait antagoniste à l’universalisme, c’est ne pas considérer que des systèmes de domination et de discrimination puissent subsister. C’est maintenir le monopole d’une idéologie, d’un groupe, sur l’universel. C’est présenter le racisme comme obsolète.« Nous c’est un pronom de prospères. Un petit mot cher aux humanistes. On est universalistes quand on ne doute pas des dons de l’univers ; on est du monde entier quand on y est bien né. », Joseph Andras, Ainsi nous leur faisons la guerre